Jérémie Jardonnet
6 avril 2022

Contestation du taux d’incapacité permanente (IPP) – comment contester et intérêt de la contestation

A la suite d’un accident du travail, ou d’une maladie professionnelle, à compter de votre consolidation, la CPAM va déterminer votre taux d’incapacité permanente partielle (IPP) pouvant vous ouvrir droit au versement d’un capital ou d’une rente viagère.

En effet, si, à la suite d’un tel évènement, vous conservez des séquelles qui ont un impact durable sur vos capacités, alors vous serez en droit de bénéficier d’une indemnisation.

Conformément aux dispositions de l’article L. 434-2 du Code de la sécurité sociale relatives à l’indemnisation de l’incapacité permanente des victimes :

« Le taux de l’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité ».

Si le taux attribué est inférieur à 10%, un versement en capital aura lieu.

Si le taux taux d’IPP est supérieur à 10%, une rente viagère vous sera attribuée dont le montant sera calculé en fonction de votre salaire annuel de référence et de votre taux.

Il est donc déterminant de s’assurer auprès d’un avocat que votre taux d’IPP n’a pas été sous-évalué.

Si vous n’êtes pas satisfait du taux d’IPP attribué par la CPAM, vous disposez d’un délai de 2 mois pour le contester. Il est obligatoire de saisir préalablement la Commission médicale de recours amiable de la CPAM (CMRA).

A réception de votre recours, la CMRA vous transmettra le rapport médical rédigé par le médecin-conseil vous ayant reçu et vous disposerez d’un délai de 20 jours pour présenter vos observations. Normalement, la CMRA statue sur pièce. Néanmoins, elle peut aussi procéder à l’examen clinique de l’assuré. En effet, lorsque le recours préalable est exercé par l’assuré, la CMRA peut d’office ou à la demande de l’assuré procéder à son examen médical.

Cette commission disposera d’un délai de 4 mois pour rendre une décision.

A défaut, une décision implicite de rejet sera réputée rendue du fait du silence gardé par la Commission.

Vous disposerez alors d’un délai de 2 mois pour saisir le Pôle social du Tribunal Judiciaire compétent, à compter de la décision implicite de rejet ou explicite.

La saisine du Tribunal judiciaire va permettre de solliciter une expertise médicale. En effet, en application de l’article R. 142-16 du code de la sécurité sociale, la juridiction peut ordonner toute mesure d’instruction, et notamment une expertise.

Il résulte des dispositions de l’article L. 142-11 du code de la sécurité sociale que les frais résultant des consultations et expertises ordonnées par les juridictions doivent être réglés par la Caisse nationale d’assurance maladie.

L’expert rendra un rapport après votre examen médical, lequel fera apparaître un taux équivalent ou réévalué à la hausse.

Cependant, il sera rappelé qu’à ce taux d’IPP « médical » peut aussi s’ajouter un « taux professionnel » (également appelé « coefficient professionnel » ou « socio professionnel »).

Ce taux s’additionne avec le taux médical. (Ex : 15% à titre médical + 6% à titre « socio-professionnel »).

En effet, il est acquis qu’une majoration du taux dénommée coefficient professionnel, tenant compte des conséquences de l’accident ou de la maladie sur la carrière professionnelle de la victime peut être attribué à celle-ci, notamment au regard du risque de déclassement professionnel, de retard à l’avancement ou de perte de gain (Cass. soc. 3 novembre 1988 nº8613911). La Cour de cassation précise que « l’article L. 453 du Code de la Sécurité sociale (ancien) ne s’oppose pas à l’évaluation distincte d’un taux « médical » et d’un taux « professionnel »  ; que c’est dans l’exercice de leur pouvoir d’appréciation que les juges du fond ont fixé ce dernier taux » (Cass. soc., 3 nov. 1988, n° 86-13.911).

A titre d’exemple, la Cour d’appel de Rouen a jugé : « Un taux professionnel aussi appelé « coefficient professionnel » peut être appliqué en cas de répercussions particulières de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle sur la vie professionnelle ou l’avenir professionnel (certain) de l’assuré-victime. […] Il s’évince de ces éléments que l’accident a eu une répercussion particulière sur sa vie et son avenir professionnels qui doit être évaluée à 5% » (Cour d’appel de Rouen, Chambre sociale, Arrêt du 3 juin 2020, Répertoire général nº 19/01988).

La Cour d’appel de Poitiers a très récemment rappelé que « Si la caisse peut fixer un coefficient professionnel, cela n’est pas obligatoire […]. L’existence ou non d’un taux professionnel relève du pouvoir d’appréciation des juges du fond » (Cour d’appel de Poitiers, Chambre sociale, Arrêt du 20 janvier 2022, Répertoire général nº 20/01611).

De même, la Cour d’appel d’Orléans a jugé en 2022 : « Les juges du fond évaluent le taux d’incapacité permanente partielle au regard des éléments d’ordre médical mais également en considération des aptitudes, de la qualification et de la perte de salaire de la victime. Ils peuvent ainsi appliquer un coefficient professionnel, sans être liés par les conclusions du rapport d’expertise » (Cour d’appel d’Orléans – ch. sécurité sociale, Arrêt du 15 mars 2022, Répertoire général nº 110/2022).

En conséquence, il convient de se souvenir que le taux d’IPP attribué par la CPAM est déterminant, puisqu’il ouvre droit à un capital ou une rente viagère. Ce taux peut être contesté. Il peut même se voir adjoindre un taux appelé « coefficient professionnel ».

N’oubliez pas également qu’au-delà de la contestation du taux d’IPP, vous pouvez engager la responsabilité de votre employeur, si une « faute inexcusable » de celui-ci est reconnue. La faute inexcusable de l’employeur est établie quand un salarié est victime d’un accident ou d’une maladie professionnelle et que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, mais qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en protéger.

Le cabinet Hujé Avocats, qui dispose d’une solide expérience dans ce type de contentieux spécifique, se tient à votre disposition.

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